À la découverte de l’univers du sculpteur Raymond Barbeau, un autodidacte complètement dédié aux bronzes d’art, depuis deux décennies. Des pièces dont la valeur est sans doute inestimable, tellement elles ont été faites avec passion.
Alors qu’il parle de son art, Raymond Barbeau ne le fait peut-être pas à dessein, mais ses conversations convergent toutes naturellement vers un même sujet: sa femme, Barbara. Elle n’était pas dans les parages cet après-midi mais elle brillait certainement par son absence, vu les meubles de la maison bardés d’oeuvres d’art desquels elle a été à maintes reprises, l’objet d’inspiration. Ce bronze nommé La mer notamment, où elle figure, les pieds dans l’eau, aux côtés d’un de leurs enfants.
« La plupart des sculptures que je fais ressemble à quelqu’un que je connais », affirme M. Barbeau, qui se dit fasciné par le corps humain, et surtout par celui de la femme. Or, si ce sujet de prédilection abonde dans son oeuvre, qui comprend aujourd’hui une vingtaine d’originaux, cet ancien ingénieur avoue sans façon qu’il est aussi épris d’une certaine déformation professionnelle. C’est notable chez son Moebius notamment, une figurine tenant le symbole de l’infini.
Mais si sa formation à l’école Polytehnique fait parfois partie de son processus de création, son art, lui, n’a pourtant rien d’académique. À l’exception d’un rare atelier auquel il a assisté à l’époque, du sculpteur André Fournelle, pour comprendre les limites du coulage du bronze lorsque l’on travaille à partir de la cire, M. Barbeau n’a jamais pris de cours pour maitriser son moyen d’expression. L’artiste qui le dit lui-même, « je n’ai pas beaucoup de techniques », y va plutôt avec la méthode essai et erreur. La Chasse galerie, qui lui a été inspirée par la légende éponyme, illustre d’ailleurs assez bien sa réalité.
Cette oeuvre réalisée sur une durée d’environ quatre mois, à raison de sept heures par jour, et qui comprend huit personnages à bord d’un canot greffé à une fourche du diable, « je l’ai refaite cinq ou six fois, indique-t-il. Pour faire une histoire courte, j’ai fait un canot qui était à peu près un pied et demi et puis j’ai mis les personnages et là j’ai vu que leurs jambes n’étaient pas tellement longues comparativement au corps, fait que j’ai allongé les jambes et me suis aperçu que le canot n’était pas assez long… » et ainsi de suite, pour un résultat final d’un canot qui mesure à peu près 34 pouces.
M. Barbeau, 84 ans, a commencé à sculpter dans la cire pour en faire des bronzes un peu après qu’il eut franchi le cap de la soixantaine. Mais sa fibre artistique ne lui vient pas de nulle part. Il faut savoir que son grand-père, Raymond Masson, un sculpteur originaire de Terrebonne, a travaillé longtemps le bois, le marbre, la glaise…ainsi que la cire !
« C’était un bonhomme qui avait les moyens; il a étudié la sculpture à Boston et à Paris », se souvient celui qui habite VMR depuis près de 60 ans maintenant. Cependant, « je ne l’ai jamais vu sculpter parce que j’étais trop jeune, mais ça m’a toujours intrigué de voir qu’il avait fait ça. »
Pendant plusieurs années, durant son adolescence, Raymond Barbeau a sculpté le bois sans trop se prendre au sérieux, pour ensuite passer à la glaise, par l’influence de son père, un dentiste qui faisait de la poterie par goût selon lui. « Ça relaxe faire ce genre de choses-là; ce n’est pas frustrant, mettons », s’amuse ce membre du groupe d’artistes TRAM.
Expo du moment: quatre bronzes d’art du sculpteur, Raymond Barbeau, en montre dans la vitrine de la Galerie Saint-Paul, dans le Vieux-Montréal.
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